Les plumes (scénario Anne Baraou, dessin François Ayroles, couleurs Isabelle Merlet) est un recueil de nouvelles dessinées qui mettent en scène quatre écrivains, atteints de parisianisme aigu, à la fois saisis de leur propre importance et dégoûtés par la facticité des pratiques commerciales des maisons d’édition. Pris dans l’ambiguïté d’une critique du système médiatique et de leur propre narcissisme qui jouit de leur position privilégiée, ils se révèlent ambivalents : en même temps authentiques et surfaits. Embarqués dans la cadence infernale de la production, tout est bon pour eux pour écrire. Mais malgré l’étalage de leurs procédés, on n’arrive pas à être convaincu de leur médiocrité. C’est plutôt la misère de la situation de l’écrivain, absurdement professionnel, qui est montrée ici. Devant la difficulté d’être génial à heure fixe, ils sont prêts à tout : aussi bien à piquer des idées qu’à trouver l’inspiration. Cette mayonnaise mixte est tout l’intérêt de ces histoires qui ne prennent jamais parti. Nous pouvons tous nous reconnaître dans ce mélange de lâcheté et de noblesse. La vérité du constat est peut-être un peu déprimante, mais elle est drôle. Le dessin de François Ayroles a la lisibilité de Tintin et le réalisme de la vie quotidienne. Cela donne un sentiment d’aventure qui évacue toute dimension sordide ou triste. Voilà un album sociologique, instructif et pudiquement humoristique. Est-il dévastateur ? Non, je ne le pense pas : il respecte, malgré la dimension critique, ses personnages. [JEAN-LUC COUDRAY]

DOSSIER LES PLUMES
1-Les plumes, de François Ayroles et Anne Baraou (par Jean-Luc Coudray)
2-Les Plumes. François Ayroles (Questions de Jean-Luc Coudray)
3-Les Plumes. Intermède. La Faune du Flore, dans Libération
4-Les Plumes. Anne Baraou (Questions de François Ayroles) [à paraître]